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mardi 19 octobre 2010

Les yeux ouverts...

Comme Frédéric Chaudier (réalisateur du film "les yeux ouverts" sur l'univers des soins palliatifs" qui va sortir sur les écrans le 3 novembre prochain), j'ai fait un séjour à Jeanne Garnier pour accompagner mon père dans son dernier sprint vers la ligne d'arrivée de son plus beau marathon. 
Comme lui j'ai trois enfants, et il est souvent difficile de se projeter quand on accompagne son propre père vers une fin de vie. L'expérience que j'ai vécue au contact des équipes médicales de Jeanne Garnier m'a bouleversé à bien des égards.

Frédéric Chaudier parle de "beauté", et je crois qu'il a raison : un sentiment mêlé d'irréel vous submerge quand vous touchez à la fragilité de la vie. L'accompagnement de mon père a été difficile et douloureux, un dernier enseignement d'un père à son fils. J'ai appris la pudeur, la discrétion et l'humilité face à la mort, cette inconnue qui était bien présente dans nos relations.
Au delà de la douleur de perdre un être chère, la relation père fils s'est transformée en une relation humaine, simple, sans détour, imprégnée d'amour, de sensibilité, d'attention, d'émotion, et de respect.

Je voudrais remercier les équipes médicales de Jeanne Garnier qui ont toujours été présentes, sans s'imposer, faisant preuve d'empathie, avec une attention bienveillante, une écoute de tous les instants, une disponibilité remarquable.

La fin de vie est un sujet grave. Bien que vivant des instants d'une gravité certaine, une belle histoire d'amour, une histoire de vie, nous ont aidées à mieux franchir cette étape difficile qui aboutit en fin de route, à une séparation qu'il faut apprendre à admettre.  Tout finit un jour, mais ne s'éteint pas définitivement selon la religion à laquelle on appartient, ou sans croire en un dieu, je pense que les esprits de ceux et celles qui ont compté pour nous, nous habitent, pour nous guider consciemment ou inconsciemment d'ailleurs.

Ce fut un vrai privilège de vivre dans cet univers difficile, et surprenant de beauté, que représentent les soins palliatifs de fin de vie. Comme Frédéric Chaudier je crois pouvoir affirmer que l'on ressort renforcé après l'expérience de la mort sans la vivre. On perçoit plus intensément les instants présents pour les vivre un peu plus intensément.

Un matin je suis arrivé dans le service qui prenait en charge mon père, comme tous les jours. La porte à côté de la chambre de mon père était ouverte, et j'ai aperçu la dame qui avait été entourée par toute sa famille la veille au soir, immobile, absente, partie, seule étendue sur son lit sans lumière ... j'ai alors ressenti un grand frisson mais aussi un sentiment mêlé de tristesse, de peur, de joie, et de satisfaction pour elle qui avait du souffrir des suites d'un long cancer. Je touchais en deux secondes le divin à travers les émotions ressenties, et l'aspect terrestre d'un corps, qui finit sur un lit immobile, amaigri et portant les traces de la fatigue et de la souffrance dues à la maladie.

Merci à Frédéric Chaudier d'avoir osé traiter un sujet si douloureux, beau et bouleversant à la fois, pour témoigner et faire partager un univers très souvent méconnu de ceux et celles qui se battent pendant des années aux côtés d'un proche malade, et qui devront accompagner une fin.

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